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Moyen-Orient - Focus

Pourquoi la France a voté en faveur d'une adhésion de la Palestine à l'ONU

Jeudi dernier, Paris s'était prononcé en faveur d'une admission de la Palestine au sein de l'organisation internationale. En 2011, le représentant permanent de la France s'était abstenu.

Pourquoi la France a voté en faveur d'une adhésion de la Palestine à l'ONU

Réunion du Conseil de sécurité de l'ONU à New York, le 18 avril 2024. Photo Angela Weiss/AFP

Le vote n’a pas fait grand bruit. Et pourtant, il marque une évolution symbolique. Du moins sur le court terme. Jeudi dernier, la France s’est prononcée au sein du Conseil de sécurité des Nations unies en faveur d’une adhésion de la Palestine à l’Organisation  des Nations unies (ONU). Un choix qui fait suite au projet de résolution présenté par l'Algérie. Celui-ci a reçu 12 voix pour, 2 abstentions (Royaume-Uni et Suisse) et 1 voix contre (États-Unis).

En 2011, lorsque la question s’était posée, la France s’était abstenue. Son représentant permanent, Gérard Araud, avait alors souligné qu’un tel vote « apparaîtrait à la fois inutilement confrontationnel et risqué ». En cause : la certitude d’un échec, puisque Washington opposerait, quoi qu’il arrive, son veto. Paris avait en revanche appuyé la démarche visant à accorder à la Palestine le statut « d’État non membre observateur », ce dont elle bénéficie dès 2012.

Dans ces circonstances, comment comprendre le récent vote de la France ? Après tout, elle savait que Washington entraverait l’initiative algérienne d’une part et que le vote de Paris susciterait forcément l’ire d’Israël de l'autre. Hier, le ministre israélien des Affaires étrangères a d’ailleurs annoncé une réunion urgente avec les ambassadeurs des pays ayant appuyé l’adhésion d’un État palestinien à l’ONU.

La démarche française semble répondre à plusieurs objectifs. Le premier est de permettre à Paris de jouer un rôle diplomatique dans une région où son influence s’est amoindrie, en profitant de l’extrême polarisation que suscite le conflit israélo-palestinien entre Nord et Sud globaux, à plus forte raison depuis le 7 octobre, pour s'ériger en possible médiateur. Le vote de Paris s’inscrit ainsi dans la continuité de la tribune signée par le président français Emmanuel Macron aux côtés des chefs d’État égyptien et jordanien, le maréchal Sissi et le roi Abdallah II. Le texte, publié dans Le Monde le 8 avril, appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza et exprime la volonté de faire aboutir la solution à deux États, dans un contexte où celle-ci apparaît  plus illusoire que jamais du fait de la poursuite à vitesse grand V de la colonisation en Cisjordanie.

En février dernier, Emmanuel Macron affirmait aussi que « la reconnaissance d’un État palestinien » n’était « pas un tabou pour la France ». Un changement de cap pour celui qui, en 2017, se disait opposé à une telle initiative.  Le vote de jeudi semble ainsi faire écho à cette nouvelle approche.

Si la demande d’admission de la Palestine a été recalée, il n’en reste pas moins que Washington n’a jamais été autant isolé sur la scène diplomatique et que le vote de Paris y a contribué. Or, le président américain Joe Biden est le seul acteur qui puisse réellement faire pression sur Israël. Pour la majorité des États membres au sein du Conseil de sécurité, la création d’un État palestinien est aujourd’hui considérée comme une condition de stabilité dans la région. Et pour compenser le refus du Conseil, l’Assemblée générale de l’ONU pourrait prochainement relancer le processus. Et Joe Biden mettre en péril sa réélection, alors qu’une partie de sa base électorale lui reproche depuis plusieurs mois sa complicité dans les crimes commis par Israël contre les Palestiniens.

Rectifier le tir

Le vote français s’explique peut-être aussi par la volonté de Paris de redorer son blason dans le monde arabe. Le capital sympathie de la France, déjà sérieusement entamé depuis le mandat présidentiel de Nicolas Sarkozy et le rapprochement opéré entre Paris et Tel-Aviv au nom de la lutte contre le terrorisme islamiste, s’est de nouveau dégradé après le 7 octobre. Paris s’est en effet trouvé en première ligne pour soutenir l’État hébreu, allant jusqu’à proposer une coalition internationale de lutte contre le Hamas sur le modèle de ce qui a été fait pour combattre l’État islamique. Nombre de figures phares du gouvernement ou du parti présidentiel sont montées au créneau pour témoigner de leur indéfectible soutien à Israël, sans égard aucun pour la situation dans les territoires palestiniens. Mais face aux critiques grandissantes émanant des rangs du Quai d’Orsay et des ambassades françaises au Moyen-Orient, Emmanuel Macron a tenté de rectifier le tir, quitte à parfois donner l'impression de jouer sur tous les tableaux. Dans un entretien exclusif avec la BBC un mois après l’activation du déluge de feu israélien contre la population gazaouie, le président français ose un « nous partageons la volonté (d’Israël) de se débarrasser du terrorisme. Mais « de facto, aujourd’hui, des civils sont bombardés. Ces bébés, ces femmes, ces personnes âgées sont bombardés et tués ». Il n’y a « aucune justification » et « aucune légitimité à cela ».

Depuis le déclenchement de la guerre à Gaza, la France et la Jordanie ont en outre procédé à plusieurs largages conjoints d’aide humanitaire sur l’enclave palestinienne réduite en cendres et affamée par Israël. Le ministère des Affaires étrangères a également multiplié les déclarations condamnant avec fermeté les raids de colons armés contre les civils palestiniens en Cisjordanie. La France a même adopté des sanctions à l'encontre de 28 colons jugés extrémistes, privés désormais d'entrée sur le territoire français.  

Malgré ce rééquilibrage diplomatique, Paris reste dans les faits un allié incontournable de l’État hébreu qu’il a, avec d’autres pays comme les États-Unis, l'Allemagne, la Jordanie, l'Arabie saoudite ou encore les Émirats arabes unis, aidé à « déjouer » la réponse militaire iranienne contre le territoire israélien dans la nuit du 13 au 14 avril, après le bombardement quelques jours auparavant d’une annexe du consulat de la République islamique à Damas, largement imputé à Israël.

Le vote n’a pas fait grand bruit. Et pourtant, il marque une évolution symbolique. Du moins sur le court terme. Jeudi dernier, la France s’est prononcée au sein du Conseil de sécurité des Nations unies en faveur d’une adhésion de la Palestine à l’Organisation  des Nations unies (ONU). Un choix qui fait suite au projet de résolution présenté par l'Algérie....

commentaires (11)

Macron!Est devenu un Madame Claude de la politique étrangère !Ce n'est pas la première fois qu'il fait volte-face !Comment pouvons-nous oublier son fameux discours au lendemain de l'explosion du port de Beyrouth?Qui peut oublier sa volte-face en laissant les Libanais pour deux bons contrats lucrative avec l'Iran!La France de Macron est une déception!Au Diable les macroniens, au diable La France!

Marwan Takchi

17 h 11, le 22 avril 2024

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Commentaires (11)

  • Macron!Est devenu un Madame Claude de la politique étrangère !Ce n'est pas la première fois qu'il fait volte-face !Comment pouvons-nous oublier son fameux discours au lendemain de l'explosion du port de Beyrouth?Qui peut oublier sa volte-face en laissant les Libanais pour deux bons contrats lucrative avec l'Iran!La France de Macron est une déception!Au Diable les macroniens, au diable La France!

    Marwan Takchi

    17 h 11, le 22 avril 2024

  • On ne risque rien puisqu'on sait que de toute façon ça ne passera pas grâce à l'Amérique. Alor, tant qu'à faire, soyons hypocrites! Mais personne n'est dupe.

    Politiquement incorrect(e)

    16 h 16, le 22 avril 2024

  • SACHANT D,AVANCE LE VETO DU PLUS GRAND HYPOCRITE DE LA PSEUDO-DEMOCRATIE, ON CHOISIT AUSSI L,HYPOCRISIE ETANT DE LA MEME MECHE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 51, le 22 avril 2024

  • @M

    Dorfler lazare

    14 h 00, le 22 avril 2024

  • Rien de nouveau ou surprenant : MENTEUR

    aliosha

    13 h 58, le 22 avril 2024

  • La France frappe toujours avec une main de fer gantée de velours. La situation en France est on ne peut plus critique, aussitôt qu’il s’agit de la cause palestinienne. Les politiciens ont eu de la peine tout au long de ces décennies de faire comprendre à tous les immigrés que le pays qui les a accueilli ne peut pas changer ses lois et ses coutumes pour leur faire plaisir. Il récoltent le fruit de leur laxisme et sont obligés de faire en sorte de jongler pour ne pas mettre del’huile sur le feu pour préserver la paix interne du pays. Même le système éducatif français s’est mis au diapason. chut

    Sissi zayyat

    12 h 59, le 22 avril 2024

  • Bientôt en France (le 9 juin 2024) il y a les élections européennes. Malgré les interdictions de manifester, de critiquer le régime sionisme (sous peine d être accusé d antisemite), de censurer les informations (d ou mon abonnement a votre journal), les Français sont majoritairement contre le soutien inconditionnel envers Israël . Je vois la plus une manœuvre pour attirer des électeurs... après ce vote est évidemment le bienvenu.

    laravine@yahoo.fr

    11 h 22, le 22 avril 2024

  • La diplomatie française reviendra sur cette proposition ? En tout cas, ce n’est pas selon l’humeur du diplomate (jadis en poste et auteur d’un livre sur Kissinger, en dit long) ou de son chef hiérarchique. Si, ""LE VOTE FRANÇAIS S’EXPLIQUE PEUT-ETRE AUSSI PAR LA VOLONTE DE PARIS DE REDORER SON BLASON DANS LE MONDE ARABE"", je pense plutôt à une main tendue vers l’Iran. L’engagement du monde arabe s’est essoufflé, et ce ne sont que des islamistes qui mènent la guerilla, téléguidés par…… suivez mon regard. Seulement la question de deux Etats est encore floue, et l’adhésion est symbolique…

    Nabil

    11 h 13, le 22 avril 2024

  • Remerciement pour cet article qui dépeind le comportement perfide du gouvernement français. Surtout, ne leur faîtes pas confiance les libanais !

    peacepeiche@gmail.com

    08 h 19, le 22 avril 2024

  • En France, la politique étrangère appartient, traditionnellement, au domaine réservé du chef de l'Etat. En soi, il s'agit d'une bonne chose, mais personne ne comprend plus rien à la position de Macron. Le principe du "en même temps" rend perplexe ses collaborateurs. Une source diplomatique française reconnaît même que "sa communication est illisible".

    Yves Prevost

    07 h 38, le 22 avril 2024

  • Merci monsieur Macron pour votre objectivité Tous les musulmans, principalement des pays arabes, y compris les chrétiens vous seront éternellement reconnaissants. Vous êtes de la lignée de De Gaulle et de Jacques Chirac, votre compréhension barre la route à l’extrémisme de tour bord. Marine Le Pen est la plus grande perdante, et grâce à vous, l’Italie, lors des prochaines élections, sauront ou donner de leurs voix. Vous réactivez la France de demain. Vous réactivez la flamme de cette France, berceau du monde multipolaire, muttiethnique,, multiculturelle, multiraciale, multireligieuse .

    Mohamed Melhem

    05 h 58, le 22 avril 2024

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